Le Gaulois mourant,  ou Gaulois du capitole, copie romaine d'un bronze grec du IIIe siècle av. J.C. On pense qu'il pourrait s'agir de l'original, en réalité

Après avoir pendant longtemps fait partie de la masse informe des "barbares" (rappelons que ce mot chez les grecs signifiait simplement "étranger") qui peuplaient les terres du nord, les grecs puis les romains apprirent à différencier les celtes des autres peuples. La question de la différenciation des germains et des celtes s'est d'ailleurs rapidement posée pour les romains. L'épisode d'Arioviste le germain, au début de la Guerre des Gaules, contribua a lever les dernières incertitudes : même si certaines tribus frontalière pouvaient se trouver à cheval sur les deux influences, les germains et les celtes n'étaient pas réductibles. Alors que les Germains entrèrent tardivement sur la scène de l'histoire, les celtes en général et les gaulois en particulier attirèrent rapidement des commentaires de la part de leur contemporains des rives de la méditerrannée.

Vous trouverez ici un petit florilège de l'opinion des auteurs antiques et de leurs pérégrinations chez les "Keltoï". Pendant longtemps, les celtes sont restés des légendes dans les bouches des marins grecs, qui parlaient de ces terres du nord avec une certaine imprécision, n'en décrivant que les zones cotières. Himilcon, navigateur carthaginois a fait de ces régions des descriptions terrifiantes et manifestement exagérées. Elles furent par la suite reprises par le poète latin Avenius, ce qui contribua encore à renforcer la légende.

 

Etrusques combattant les gaulois, urne funéraire étrusque, IVe siècle av. J.C.

Les auteurs ont longuement commenté l'aspect physique et les moeurs des Celtes, qui suscitaient beaucoup d'étonnement chez les peuples du sud. Ainsi, Diodore de Sicile, au Ie siècle av. J.C., déclarait à leur propos :
        "Les Gaulois sont de grande taille, leur chair est molle et blanche ; non seulement leurs cheveux sont naturellement blonds, mais ils s'appliquent à rehausser cette couleur en les lessivant continuellement avec de l'eau de chaux. Ils les tirent du front vers le sommet de la tête ou de la nuque. Grâce à cette opération, leurs cheveux deviennent épais comme la crinière des chevaux".
       « Leur amour du vin est extrême; ils étanchent leur soif avec un vin pur importé par les marchands. Leur penchant les pousse à boire avidement et quand ils sont ivres, ils tombent dans la stupeur ou deviennent fous furieux».
      "Physiquement, les Celtes ont une apparence terrifiante, une voix rude et caverneuse.  Ils utilisent peu de mots dans leurs conversations et parlent par énigmes, se contentant le plus souvent d'allusions qui laissent beaucoup à deviner.  Ils pratiquent souvent l'exagération dans le but d'exalter leurs propres mérites et de diminuer ceux des autres. Ce sont des vantards qui ont la menace à la bouche et se font les chantres pleins d'emphase de leurs propres exploits.  Ils ont pourtant l'esprit vif et montrent un don naturel pour l'étude.  Ils ont des poètes lyriques qu'ils appellent bardes et qui chantent, en s'accompagnant d'instruments qui ressemblent à des lyres, tantôt des dithyrambes, tantôt des satires".

On ne peut accuser Diodore de Sicile d'être de mauvaise foi, mais force est de constater que cette description ne manque pas de stéréotypes. Il est probable qu'à la manière de César, il ait un peu forcé le trait pour impressionner ses lecteurs. Il est cependant vraisemblable que ces descriptions reposent sur des caractères plus ou moins prononcés selon les individus, mais réels, tels qu'il a pu les observer.

 

Prisonnier gaulois, Italie, 
Ie siècle 
ap. J.C.

Strabon, à peu près à la même époque, nous donne un autre aperçu, un peu du même ordre : 
   «L'ensemble de la race que l'on appelle aujourd'hui gallique aime follement la guerre; elle est intrépide, prompte à se battre, mais fruste de moeurs et sans vices. Une fois irrités, les Gaulois se rassemblent et se ruent au combat ouvertement et sans réflexion.  Ils tombent alors facilement sous les coups de ceux qui veulent les circonvenir par la manoeuvre ; car si on les provoque, n'importe où, et sous n'importe quel prétexte, on les trouve toujours prêts à faire face au danger, même s'ils n'ont pour tout recours que leur force et leur courage. Si au contraire on agit par persuasion, ils s'offrent sans difficulté à faire des choses utiles et on les voit s'essayer aux arts libéraux et à l'éloquence. Leur force vient en partie de leur taille qui est haute, en partiede leur nombre».
        « A leur franchise à leur fougue naturelle, les Gaulois joignent une grande légèreté et beaucoup de fanfaronnade, ainsi que la passion de la parure, car ils se couvrent de bijoux d'or, portent des colliers d’or autour du cou, des anneaux d'or autour des bras et des poignets, et leurs chefs s'habillent d'étoffes teintes de couleurs éclatantes et brochées d'or.
       A cause de cette légèrete de caractère, la victoire les rend insupportable mais la défaite les plonge dans la stupeur. Leur irréflexion s'accompagne aussi souvent de sauvagerie et de barbarie, comme si souvent chez les peuples du nord».


Virgile, dans l'Enéide (VIII), en donne une autre description, pour le moins extatique : " d'or sont leurs cheveux, d'or est leur vètement, des rayures claires égayent leur sayon ; leurs cous, blancs comme le lait, sont cerclés d'un collier d'or ; aux mains de chacun scintille le fer de deux grands javelots alpins ; de hauts boucliers couvrent la longueur de leur corps."

Arrien (IIe siècle ap. J.C.) est pour sa part un peu moins dithyrambique, et peut être plus synthétique : "les Gaulois sont de grande taille et ont d'eux même une haute opinion."

Quant à la coquetterie des Gaulois, César ajoutera que ceux-ci étaient très attentifs à leur propreté, utilisant savon et parfum. Le général romain reconnaît que quelle que soit sa condition, jamais un gaulois ne se présente mal habillé.

Platon, finalement, les classe défintivement sans appel parmi les ivrognes : " parmi les peuples qui ont coutume de s'ennivrer, on compte les Carthaginois, les Celtes, les Ibères, les Thraces, races guerrières".

Posidonios, écrivain grec du Ie siècle av. J.C., visita l'intérieur de la Gaule, et en ramena de nombreuses descriptions, souvent très détaillées sur les moeurs des Celtes.

 
Le sac de Rome par les Gaulois en 390 av. J.C. 
(détail) Paul Jamin, huile sur toile, XIXe s.

Quoi qu'il en soit, les celtes marquèrent profondément l'historiographie romaine et grecque. Les invasions de l'Italie et de la Grèce laissèrent aux uns et aux autres une certaine amertume, surtout aux romains. La catastrophe de la chute de leur ville en 386 engendra de leur part le profond sentiment qu'une revanche devait être prise. C'est sans doute cela qui fit de César un héros, plus que la difficulté de la guerre qu'il eut à mener en Gaule qui ne fut sans doute pas plus importante que les guerres Puniques. Mais César avait vengé une humiliation vieille de plus de trois siècle, et il en avait lui même conscience. C'est auréolé de cet immense prestige qu'il s'autorisa à franchir le Rubicon en armes.       

Tite Live, dans son Histoire de Rome, donne de l'épisode de la prise de la ville par Brennus evrs 390 av. J.C. une description prompte à frapper les esprits (illustrée par Paul Jamin dans la toile reproduite ci-contre) : " trouvant clos les logis des plébéïens et ouverts les atriums des nobles, ils hésitaient presque plus à envahir les maisons ouvertes que les autres : car ils éprouvaient une sorte de vénération à voir, assis dans leurs vestibules, ces personnages à qui leurs costumes conféraient une grandeur plus qu'humaine [...]. Ils auraient pu être des statues dans un sanctuaire, et devant eux les gaulois se tenaient un instant médusés. Soudain l'un d'eux, un certain Marcus Papirius, à qui un guerrier avait touché la barbe [...] lui donna sur la tête un coup de son baton d'ivoire, déclenchant du même coup sa colère. Il fut massacré, avec tous ceux qui se tenaient assis. Les Gaulois pillèrent les maisons et, après les avoir vidées, y mirent le feu ".

Il semble que les mercenaires celtes aient été nombreux dans la plupart des armées du bassin méditérranéen, et une quantité non négligeable accompagnait Alexandre dans ses conquètes.

>> Le déclin des celtes continentaux